Le Cercle des Amis des Stations et des Gares présente la gamme Accès 2030 des nouvelles entrées du métro parisien

Après 8 ans d’une étroite collaboration entre le Studio Aurel Design et la RATP, les accès de la nouvelle gamme pour le métro parisien ont enfin fait leur apparition sur les nouvelles stations du prolongement des lignes 12 et 14, et en particulier à Porte de Clichy où le premier exemplaire été installé en janvier 2021.

La nécessité du développement de cette nouvelle gamme Accès 2030 pour le traitement des accès au métro parisien s’est imposée sur la base de deux raisons concomitantes : l’important programme de création de nouvelles stations, avec les prolongements des lignes 4, 11, 12 et 14 et la prise de conscience d’un impératif besoin de cohérence pour le métro parisien à l’échelle des enjeux que constituaient ces prolongements dans le contexte du territoire du nouveau Grand Paris.

En effet, les solutions architecturales existantes pour le traitement des accès aux stations relevaient soit d’esthétiques trop anciennes, soit de logiques ponctuelles trop discrètes, sinon hétéroclites. La notion de gamme pour les accès est une longue histoire à la RATP qui débute dès 1900 avec la stylistique Guimard. La RATP a donc décidé de développer un nouveau standard pour les accès aux espaces de transport. Et comme en 1900 où la création du métro avait permis le développement des audacieux accès d’Hector Guimard, la RATP a voulu donner à ses nouveaux accès une identité contemporaine, valorisante et transversale sur les territoires desservis.

Les liens d’identité et de continuité esthétique entre les accès en surface et leurs stations souterraines

Si pour les accès aux stations l’enjeu d’identité semble naturellement évident, il faut pouvoir les identifier dans la ville, toutefois cette identification pourrait être comprise comme relevant essentiellement des objets signalétiques qui les accompagnent. Dans le contexte parisien, les signes identifiants du métro restent confus tant ils ont été déclinés selon différentes époques, et surtout le fait que ces différents signes sont toujours présents sur le réseau d’aujourd’hui.

La stylistique puissante des accès Guimard d’origine a imposé aussi une identification urbaine qui passe par l’esthétique. Les aspects « signalétiques » sont intégrés et déclinés dans l’esthétique même des accès, et toutes les gammes d’accès qui se sont succédées depuis ont traduit cette même posture initiale : Lettres métropolitain de Guimard, Caisson à crosses du Nord-Sud, Mât Dervaux des entourages fer de lance, M Jaune des entourages inox, Arbre urbain des entourages Météor …

La question de la continuité esthétique entre le traitement de l’accès et celui des espaces intérieurs de la station ne s’est pas posée tout de suite. Le réseau a développé longtemps des ambiances intérieures, sinon totalement identiques, du moins assez cohérentes. La discontinuité entre le dedans et le dehors s’est focalisée principalement autour du socle de pierre des entourages. Le traitement spécifique en pierre Garchey des murs d’échiffre (et des accès intérieurs de 1900) pour les trémies Guimard a progressivement disparu, seules les céramiques d’origine des trémies Nord-Sud ont plus ou moins été conservées. Le carrelage, en totale continuité avec l’univers intérieurs s’est imposé, le biseauté mais aussi les carrelages plus spécifiques des stations modernes sur les prolongements de ligne des années 1970-1980. La banalisation urbaine du métro a fait le reste, et emporté dans des désirs de modernité prépondérante nous avons pu croire quelque temps que le M jaune devienne un standard sur tout le territoire urbain.

La prise de conscience des enjeux

La reprise du programme de prolongement des lignes du métro hors Paris, interrompu en partie au moment de la conception de la nouvelle ligne 14, n’a pas requestionné cet enjeu d’identité urbaine. La nouvelle ligne 14 a développé en 1998 son propre traitement pour les nouveaux accès, et la synergie entre esthétique intérieure et entourage en trémie s’est imposée. La conception des nouvelles stations des lignes prolongées, ligne 13 à Gennevilliers 2008, ligne 12 à Saint-Denis Aubervilliers 2012, ligne 4 à Montrouge 2013, se sont faites par à coup mobilisant chaque fois des équipes de conceptions différentes. Les résultats ont laissé la RATP dubitative quant à l’efficacité des options de visibilité urbaine que les nouveaux accès et bâtiments ont pu proposés. L’ampleur du programme de création de nouveaux accès avec le prolongement à Saint-Ouen de la ligne 14 2020, les prolongements de la ligne 12 à Mairie d’Aubervilliers et de la ligne 4 à Bagneux 2022, mais surtout le prolongement de la ligne 11 à Rosny 2024, a naturellement réintroduit la question d’un traitement plus transversal des accès.

Mais aussi et par ailleurs, la recomposition en 2008 de la maîtrise d’ouvrage au sein des services techniques de la RATP a permis de réintroduire ce type de questionnement dans le programme des projets. Une réflexion plus générale a pu aussi prendre corps autour de la question de l’identité stylistique des espaces intérieurs des nouvelles stations, et en particulier à travers l’affirmation progressive d’une politique de standards. L’important programme Renouveau du Métro a aussi contribué à faire évoluer les consciences autour de ces questions d’identité des espaces. Le traitement des aménagements intérieurs en mesure de donner une expression contemporaine à cette identité a d’abord été subordonné aux choix d’architecture défendus par les architectes extérieurs retenus pour la conception des stations : Equipe LIN Finn Geipel pour les phases 2 des prolongements ligne 4 à Bagneux et ligne 12 à Aubervilliers, Equipe AZC Grégoire Zündel pour le prolongement de la ligne 14 à Saint-Ouen. C’est avec le prolongement de la ligne 11 à Rosny Bois-Perrier que la recherche d’une identité plus simple et plus évidente s’est imposée, favorisant plus de continuité entre stations historiques et stations nouvelles. La conception de la nouvelle gamme des Accès 2030 s’est tout naturellement inscrite aussi dans cette prise de conscience du métro parisien comme patrimoine d’hier, d’aujourd’hui et de demain.

Les enjeux du choix du meilleur des concepteurs

Dans le cadre de sujets architecturaux complexes, la conception et la mise en oeuvre de solutions en capacité de répondre au-delà de leurs intentions et de traverser les époques est quelque chose de pas si évident à mettre en oeuvre. Pour le projet de conception d’une nouvelle gamme pour les accès aux stations du métro parisien, l’ambition s’est tout de suite imposé autour la question de « faire patrimoine », c’est-à-dire de répondre au double enjeu d’une identité évidente permettant une appropriation publique et d’une sérieuse rigueur quand à l’efficacité durable des solutions mises en oeuvre.

Pour cela l’équipe RATP, en charge du développement des standards d’aménagements et d’équipements des espaces voyageurs, a choisi la méthode la plus fiable, celle d’associer la compétence de conception dès l’amont de la démarche. Cette méthode permet d’explorer sans à priori, d’avancer en aller retour permanent autour des contraintes, comme de gérer le plus sereinement possible les niveaux d’exigences à imposer. Le choix du concepteur s’est porté sur une sélection de compétences associant architecture et design, associant la vision urbaine des impacts architecturaux et le soin détaillé de la mise en œuvre des formes et des matériaux. Ensuite le petit panel de concepteurs sélectionnés a été départagé sur la base d’une expression programmatique des enjeux, par un exercice de compréhension mutuelle avec une note d‘intention associée à des esquisses stylistiques. Cela a permis de choisir Marc Aurel sur l’intime conviction que nous partagions sur ce sujet un univers commun et que nous saurions faire équipe tout au long de la démarche que nous engagions.

Une approche transversale en parallèle des projets

Le développement de cette nouvelle gamme s’est imposé au sein de la maîtrise d’ouvrage de façon assez évidente pour pouvoir être lancé sans trop de débats. Les retours d’expériences les plus récents ont convaincu des limites d’accès conçus dans l’unique optique esthétique de chaque projet. Si dans le cadre des projets financés, la fenêtre de tir était réduite, le temps long de leur développement offrait la durée nécessaire pour lancer en parallèle une démarche transversale de conception, qui pourrait ou non se switcher aux dispositions retenues pour les accès et prévues initialement dans chaque projet.

La relative indifférence de la machine des projets au regard de ce sujet trop particulier a permis de limiter le nombre d’intervenants et de s’inscrire dans une dynamique nettement plus sereine, favorisant l’approfondissement du travail tant de conception que d’expertise. Mais en retour le switch envisagé s’est avéré plus compliqué que prévu. La résistance des architectes de projets, comme la non réversibilité de certains de leurs choix qui nécessitaient des remises en cause, a plutôt modéré au final les ambitions de déploiement de la nouvelle gamme. Le développement du traitement des accès en rez-de-chaussée, des débouchés d’ascenseurs en édicules, la solution d’accès couverts, ont été abandonnés. Les formes et dimensions de trémies conçues pour d’autres types d’aménagements, trop tard pour être modifiées, se sont imposées, et il a fallu faire avec.

L’ensemble des experts de la RATP ont été associés aux projets. La standardisation permet un travail plus fin, de soulager les projets, et de garantir la faisabilité industrielle dans les objectifs financiers et de faciliter ensuite leur entretien et maintenance. Le découpage de la gamme en différents produits (entourage, totem, porte-plan, support de proximité) a favorisé un déploiement nettement plus large de la gamme au-delà des seuls nouveaux accès, Certains composants comme les porte-plans, les supports d’information de proximité et les totems ont été conçus pour pouvoir être utilisés indépendamment avec par exemple le remplacement de tous les porte-plan sur les accès existants. Mais l’achat et la fabrication de chacun, en relevant de différents fournisseurs, ont nettement complexifié la mise en œuvre des ensembles sur chacun des sites.

Les référents stylistiques : réinterprétation des codes identitaires

Le concept retenu pour cette nouvelle gamme a été celui d’une réinterprétation des codes identitaires du métro parisien, afin d’entretenir un dialogue entre mémoire et modernité. La mémoire correspond à l’ensemble des gènes constitutifs du métro parisien et la modernité est liée aux nouvelles technologies, aux nouveaux matériaux et aux nouvelles attentes des voyageurs. Il est par exemple nécessaire d’éclairer les escaliers pour le confort de tous et en particulier des malvoyants, ainsi, les mains-courantes de l’accès intègrent un éclairage. Il convient aussi d’ajouter des lisses basses sur mur d’échiffre, pour répondre aux besoins d’accessibilité des personnes à mobilité réduite. Entre “mémoire et modernité” correspond à la nécessité d’évoluer, en maintenant une cohérence stylistique sur tout le réseau de la ville.

Ainsi, les accès 2030 ont été conçus dans une recherche identitaire en filiation contemporaine avec les entrées de Guimard. La logique identitaire est portée par un dessin affirmé de la courbe, par des matériaux de qualité : céramique, pierre de Comblanchien, acier et laiton.

Bénédicte LEDOUX et Didier BERNARD

Le Cercle des Amis des Stations et des Gares

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