Conscients de la nécessité d’un débat sur une évolution des missions dévolues aux architectes fonctionnaires dans le contexte actuel, et partant du constat de près de dix ans écoulés à Paris sans organisation d’un concours de recrutement d’architectes voyers, nous avons proposé qu’un état des lieux et une analyse prospective concertée soient établis avant toute réforme de statut. Nous estimons que cette question, au-delà de son importance pour la ville de Paris, dépasse le cadre parisien et consolidera une nécessaire réflexion sur la place des architectes auprès de la maîtrise d’ouvrage publique dans les grandes collectivités et métropoles françaises.
Notre proposition de méthode de travail, dont l’ambition est portée par les nombreux soutiens à notre pétition, n’a pas, pour l’instant, été retenue. De nouvelles délibérations sont en effet proposées au Conseil de Paris les 2, 3 et 4 mai prochains avec un projet sensiblement différent, mais qui ne répond toujours pas aux inquiétudes et questions que nous avions posées au sujet des précédents projets de délibération de mars. Grâce à votre mobilisation, la disparition du corps des architectes voyers n’est plus évoquée. Mais aucune indication n’est apportée afin de mieux définir les missions qui leur sont confiées au regard des besoins de la Ville, et aucune perspective de recrutement n’est annoncée.
En revanche, une spécialité « architecture et urbanisme » est créée dans un corps d’ingénieur de catégorie A, sans lien avec le corps des architectes voyers, avec pour statut de référence celui des ingénieurs des travaux publics de l’État. Les fonctions envisagées pour les architectes qui y seront admis ne sont pas clairement identifiées ; leur niveau de qualification et les modalités de leur recrutement restent flous (le titre d’architecte n’est pas exemple pas requis pour le concours interne et le concours sur titre) ; leur seule perspective d’évolution interne à la Ville sera un corps d’ingénieurs cadres supérieurs sans spécialité.
Pourquoi créer subitement deux modes de recrutement des architectes, sans liens entre eux ? Cette proposition, prise dans la précipitation, fragile juridiquement, excluant toute réflexion sur le corps des architectes voyers dont le recrutement est gelé, annonce l’extinction probable à moyen terme de ce corps d’architectes cadres supérieurs de l’administration parisienne. Doté d’une expertise de haut niveau, engagé, fidèle à une déontologie professionnelle, son niveau hiérarchique est garanti par un recrutement sur concours sur épreuves de même nature que celui des Architectes et Urbanistes de l’État, son corps équivalent de la fonction publique d’État.
Le nouveau projet de réforme, en proposant des réponses partielles et en éludant notamment un débat pourtant nécessaire sur la place de l’architecture et de l’urbanisme dans l’action de la municipalité, sera plus cause de confusion, de problèmes de gestion, que de clarifications. Aux côtés de nos collègues ingénieurs, qui dénoncent également un projet insuffisamment construit, nous estimons que la qualité globale de l’ingénierie de l’administration parisienne s’en ressentira, et nous rejetons donc le projet en l’état.
Ainsi, avant le 2 mai, date d’ouverture du prochain Conseil de Paris, exprimez votre attachement aux ambitions portées par la loi sur l’architecture de 1977, et demandez, vous aussi, aux élus du Conseil de Paris, et par tous moyens à votre convenance, la tenue d’assises sur la place de l’architecte dans la fonction publique parisienne avant l’examen de tout projet de réforme.